ROUTINE D’UNE JOURNÉE DE LA DÉCENNIE PERDUE ANNONCÉE, par François Leclerc

Billet invité

La journée a commencé par l’annonce officielle et largement anticipée des mesures prises à l’encontre de BNP Paribas, agrémentée d’interrogations sur le sort qu’allaient pouvoir connaître les autres banques européennes soupçonnées du même viol d’embargo : Crédit Agricole, Société Générale, Commerzbank et Unicredit. Consolation, les Français ne seraient pas seuls à être visés par les Américains !

Alimentant une chronique bancaire jamais en défaut de matière, la journée s’est poursuivie par la chute en bourse de la banque portugaise Espírito Santo (L’Esprit Saint) ainsi que de sa holding sise au Luxembourg, toutes deux longtemps présentées comme saines grâce à d’obscurs tripatouillages comptables. En attendant la suite.

Côté croissance, ce n’est toujours pas le grand beau. Notamment en Italie où le gouvernement Renzi court après le financement des mesures qu’il a annoncées. Selon Istat, le PIB qui avait enregistré une chute de 1,9 % l’année dernière ne devrait pas progresser de plus de 0,3 % cette année, s’il sort toutefois du négatif. Les prévisions gouvernementales s’appuient sur 0,8 %, et ce résultat à la baisse ne sera pas sans effets sur les rentrées fiscales, s’il se confirme. Les prévisions d’inflation de l’institut sont également à la baisse, estimées sur l’année à 0,3 %. Combien de sommets européens faudra-t-il tenir pour mettre l’Italie sur le chemin de la rédemption ?

Pour évaluer la suite des opérations avec les moyens du bord, deux indices tiennent désormais le haut du pavé : l’inflation et le volume du crédit bancaire. Collé à 0,5 % dans la zone euro, le premier continue de faire preuve d’un grand accès de faiblesse et exprime la poursuite d’une pression déflationniste prononcée ; et le second témoigne d’un nouveau resserrement du crédit aux entreprises, dont les banques sont présentées comme portant la responsabilité. Celles-ci rétorquent que la faiblesse de la demande est en cause et, une fois n’est pas coutume, n’ont pas nécessairement tout à fait tort.

Adair Turner, ex-président de l’autorité de régulation du secteur financier britannique (FSA), partage cette analyse et prend le contre-pied de ses collègues de la BCE et de la Banque d’Angleterre, dans la foulée d’Atif Mian et Amir Sufi, les auteurs de « House of Debt » auxquels il fait référence. Il rapproche la situation européenne des décennies de stagnation et de déflation qu’a connu le Japon et reproche aux autorités politiques européennes de ne chercher à résoudre que le problème des banques en espérant ainsi sauver l’économie.

La journée n’est pas finie…